• EPISODE 3: On se jauge, on s'estime...on se méprise et se méprend....

    GARNERAY1
    - "Mes amis", nous dit Surcouf, dont le regard étincelle d'audace, "ce navire appartient à la Compagnie des Indes, et c'est le ciel qui l'envoie pour que nous puissions prendre sur une revanche de la chasse que nous a donné hier LA SYBILLE ! (1) Ce vaisseau, c'est moi qui vous le dis, et je ne vous ai jamais trompés, ne peut nous échapper !...Bientot il sera à nous: croyez-en ma parole ! Cependant comme la certitude du succès ne doit pas nous faire méconnaitre la prudence, nous allons commencer d'abord  par tacher de savoir si tous ses canons sont vrais ou faux".

    Le brave rusé Breton fait alors diminuer de voiles pour se placer au vent, par son travers, à porté de 18. A peine cette manoeuvre est-elle opérée, qu'un insolent et brutal boulet part du bord de l'ennemi pour assurer ses couleurs anglaises. A cette sommation d'avoir à montrer notre nationalité, un silence profond s'établit sur LA CONFIANCE.

    -" Imbécile" s'écrie Surcouf en haussant les épaules d'un air de pitié et de mépris.

    Apostrophant alors l'ennemi comme s'il eut été un adversaire en chair et en os, notre capitaine se met à débiter, avec entrain et une verve qui fasait bouillir d'enthousiasme le sang de l'équipage dans ses veines, un discours, en argot maritime, qui est resté comme le chef d'oeuvre du genre.

    Surcouf parlait encore, lorsque l'Anglais, irrité de notre lenteur à obéir à ses ordres, nous envoya toute sa bordée.

    - "A la bonne heure donc !" s'écrie notre sublime Breton radieux ;" voila qui s'appelle parler franchement. A présent, mes amis, assez caussé. Soyons tout à notreffaire."

    Alors aprés trois solennels coups de sifflet de rigueur, le maitre d'équipage Gilbert commande:

    - "Chacun à son poste de combat !"

    Et le silence s'établit partout.

    La bordée de l'Anglais nous avait, est-ce la peine de le dire, parfaitement prouvé que les trente-huit canons qui allongeaient leurs gueules menaçantes par ses sabords étaient on ne peut plus véritables et ne cachaient aucune supercherie.

    Une chose qui nous surprit au dernier point et nous intrigua vivement fut d'apercevoir sur le pont du vaisseau ennemi un gracieux état-major de charmantes femmes vétues avec beaucoup d'élégance et nous regardant, tranquillement abritées sous leurs ombrelles, comme si nous n'étions pour elles qu'un simple objet de curiosité !

    Ce vaisseau, malgré les couleurs qui flottaient à son mat, appartenait-il donc à la riche compagnie danoise ? Car le Danemark étant alors en paix avec le monde entier, et protégé par l'Angleterre, à qui il rendait en sous-main tous les services imaginables, ses navires parcouraient librement toutes les mers, surtout celles de l'Inde. Mais alors pourquoi nous avoir envoyé sa bordée ? probablement parce que, beaucoup plus fort que nous, et nous considérant comme étant en sa puissance, il tenait à rendre un service à l'Angleterre son amie. Cela pouvait etre.

    D'un autre coté, nous nous demandions si ce n'était pas par hasard un vaisseau trompeur ? Mais non, cela n'est pas probabale, car alors, au lieu de faire parade du nombreux équipage qui encombre son pont, il l'aurait en ce cas dissimulé avec le plus grand soin.

    - " Ah !" nous dit Surcouf, qui partage lui-meme nos incertitudes, "je croyais ce John-Bull un East-Indiaman..." Voici à présent de nombreux officiers de l'armée de terre qui se montrent sur le pont, et rendent cette supposition invraisemblable..."Enfin, n'importe", reprend le Breton aprés un moment de silence en broyant, sans sans douter, son cigare entre ses dents, "qu'il soit ce qu'il voudra peu importe ! l'essentiel, pour le moment, c'est de nous en emparer ! Ainsi donc, hissons le pavillon français en l'assurant d'un coup de canon."
    Cet ordre, qui rend le combat inévitable, est exécuté.

    A SUIVRE, cliquez ici

    Auteur: Louis Garneray "Compagnon de Surcouf"
     

    LIVRE-DE-COURSE.jpgSur le livre de bord de la confiance ci-dessus on peut lire qu'à l'origine la confiance était dotée de 24 canons et de 250 hommes.

    (1) La veille il avait échappé de peut à la frégate anglaise la sybille en jetant la plupart des ses canons à la mer. sur 18 canons il ne lui en restait que 6.
     

     
    « EPISODE 2: Tout le monde sur pont ! BRANLE-BAS DE COMBAT ! ! !EPISODE 4: La harangue de Surcouf avant le combat »

    Tags Tags : , , , , , , , ,
  • Commentaires

    1
    Jeudi 11 Février 2010 à 12:00
    je me régale de tes histoires rejane
    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :